Regards et préjugés, la culture chez les jeunes en questions.
Lucie, comédienne, co-directrice artistique d’Anima Compagnie, professeure de théâtre auprès des écoles et du conservatoire de Laval agglomération.
« Nous avons de la chance dans notre département, tout collégien sera confronté à un moment ou à un autre à la pratique théâtrale. Il y a aussi énormément de théâtre amateur. Les élèves sont acculturés à cette pratique grâce à l’école. Je le remarque à chaque fois que je rencontre de nouvelles classes, il y a beaucoup de mains qui se lèvent lorsque je demande s’ils ont déjà fait du théâtre.
J’ai fait de très belles rencontres, souvent dans des classes dites « pas faciles ». On commence par transformer une classe en un espace théâtral, puis il faut vaincre les timidités, les a priori. Et d’un coup ça se déclenche. Ils proposent de plus en plus, ils demandent que ça continue. Ce sont des moments très intenses.
En général, les élèves pensent que le théâtre est assez poussiéreux. Ça ne vient pas de nulle part. Dans les programmes, ils étudient Molière ou Musset. Alors que le répertoire contemporain contient des textes jeunesse d’une richesse inouïe. Il faut leur montrer qu’il existe des textes théâtraux qui parlent de leur époque et d’eux. C’est la clé pour moi si on veut qu’ils s’intéressent à cet art. Leur montrer que le théâtre peut être ancré dans leur réalité.
Ils ne se donnent pas le droit d’aller au théâtre, ils estiment que c’est trop loin d’eux. L’enseignement théâtral peut permettre à certains de trouver une vocation professionnelle, à d’autres de découvrir que le théâtre est aussi fait pour eux. Quand je vois combien les élèves peuvent se mettre en action et jouer tout simplement. Je suis convaincue qu’on peut faire passer des idées à travers cette pratique. La notion de base au théâtre, c’est l’écoute et rien que ça c’est un enseignement. Pour beaucoup d’élèves définis comme hyper actifs, en échec scolaire, le théâtre permet de s’exprimer différemment et de s’épanouir.
Le premier confinement nous a sidérés. J’ai eu du mal à me relancer et à être force de proposition. Il y a une perte de sens à vouloir faire du spectacle vivant à travers les écrans. Comment continuer cette pratique alors que la base du travail, c’est le ressenti, les sentiments, l’autre aussi. »