Regards et préjugés, la culture chez les jeunes en questions.
Simon, enseignant en communication numérique et fondateur de l’agence de communication numérique AKWO.
« Je n’opposerais pas les pratiques dites classiques et les pratiques numériques. Au contraire, c’est tout à fait complémentaire. Mais une journée n’est faite que de 24 heures, alors qui sera le vainqueur entre un musée et une série Netflix ? Elles ne s’affrontent pas sur le plan de la valeur mais elles sont différentes en termes d’accès et de ressentis émotionnels. Les interfaces numériques jouent sur la sécrétion de dopamine afin de devenir addictives. Elles sont conçues comme des drogues, plus on y va et plus on veut y aller. Le nombre de secondes entre deux épisodes Netflix a été imaginé pour que notre cerveau n’ait pas le temps de dire stop. Il y a aussi l’impression d’appartenir à une communauté et ça compte beaucoup, notamment à l’adolescence. Le confinement n’a rien changé à cela. Je pense que nous avons eu plus de temps pour amplifier nos pratiques habituelles.
Le musée, le cinéma, c’est plus lourd à organiser alors que les écrans sont là, facilement à disposition, avec la dopamine en récompense. C’est du « snack content » vite disponible, vite consommé. Un youtubeur comme Squeezie fait des montages en fonction de ça, une nouvelle image et un nouveau contenu toutes les 2 ou 3 secondes.
Le gap générationnel est aussi une réalité. Des parents continuent de demander à quoi servent les écrans et internet. Il est essentiel qu’ils connaissent et comprennent les cultures numériques pour pouvoir accompagner leurs enfants. On ne laisse pas un enfant seul devant La liste de Schindler ou lire sans contexte Si c’est un homme de Primo-Levy. Pour les écrans, c’est la même chose. Les technologies sont encore plus dangereuses car tout semble tellement réel.
Je ne suis pas alarmiste quant aux écrans et au web à l’exception des meta-vers, ces univers virtuels où on vit des choses à travers un personnage inventé. Notre avatar peut ainsi assister à des concerts ou autres. Ces espaces ont pris de l’ampleur pendant le confinement. Attention, car le risque c’est que le virtuel rivalise directement avec le réel. »